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Ainsi debout dans sa robe égrenée de flammes bleues, imbibée d’effluves, les bras ramenés derrière le dos, la nuque un peu renversée sur le cou tendu, elle demeurait immobile, mais, par instants des frissons passaient sur elle et les yeux de saphir tremblaient, en pétillant, dans leurs prunelles d’étoffe remuées par la hâte des seins.

Alors l’homme à la tête glabre, au crâne en œuf, s’approcha d’elle, des deux mains saisit la robe qui glissa et la femme jaillit, complètement nue, blanche et mate, la gorge à peine sortie, cerclée autour du bouton d’une ligne d’or, les jambes fuselées, charmantes, le ventre gironné d’un nombril glacé d’or, moiré au bas comme les cheveux de reflets mauves.

Dans le silence des voûtes, elle fit quelques pas, puis s’agenouilla et la pâleur inanimée de sa face s’accrut encore.

Reflété par le porphyre des dalles, son corps lui apparaissait tout nu ; elle se voyait, telle qu’elle était, sans étamine, sans voile, sous le regard en arrêt d’un homme ; le respect épeuré qui, tout à l’heure, la faisait frémir devant le muet examen d’un Roi, la détaillant, la scrutant avec une savoureuse lenteur, pouvant, s’il la congédiait d’un geste, insulter à cette beauté que son orgueil de femme jugeait indéfectible et consommée, presque