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devait réparer des gonds. Jacques l’emprunta.

Cette clef n’enfonçait pas dans la grande porte de l’église qui s’ouvrait, près du château, sur le chemin. Il dut contourner le portail, pénétrer dans le cimetière, enclos de palis, plein d’herbes folles et de croix en bois noir et en fonte mangée de rouille. Il chercha les sépulcres de ces Marquis dont parlait le père Antoine, mais il ne parvint pas à les trouver ; de serpigineux ulcères de lichen et de mousse rongeaient les tombes dont les creuses inscriptions étaient depuis longtemps comblées ; peut-être était-ce sous l’une de ces pierres que gisaient les restes abandonnés des Saint-Phal ?

Ce cimetière était pimpant dans le coup de soleil qui le frappait. C’était une bagarre d’herbes, une cohue de branches au milieu desquelles s’épanouissaient sur des tiges onglées de griffes les boutons du rose indolent des églantiers. Dans ce terrain, abrité par l’église, l’air paraissait plus tiède ; des bourdons ronflaient, cassés en deux, sur des fleurs qui se balançaient en pliant sous leur poids ; des papillons volaient de travers comme grisés par le vent, quelques-uns des pigeons sauvages du château filaient à tire-d’aile avec un cri d’étoffe.

Jacques regretta de n’avoir pas connu plus tôt ce petit coin, si placide et si douillet ; il lui sembla que là seulement il pourrait pactiser avec