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un long gaillard dont la tête glabre tenait de celle du bedeau et du jocrisse.

— Donne-nous du cassis et du vin, mon homme, et de l’eau fraîche, répondit le père Antoine.

Tandis que le vieux examinait, les coudes sur la table, le jeu des voisins, Jacques embrassa d’un coup d’œil la salle, une grande salle aux murs peints en vert d’eau, avec des soubassements et des filets chocolat. Çà et là, des affiches d’assurances et des prospectus d’engrais ; un exemplaire de la loi sur l’ivresse collé par des pains à cacheter aux quatre coins ; une règle encadrée du jeu de billard et des boules enfilées sur une tringle pour marquer les points.

Au plafond, quelques lampes à schiste ; tout autour de la pièce, des bancs d’écoliers et des tables revêtues d’une toile cirée, écorchée, montrant ses fils.

Au centre, un billard massif avec des cuivres du temps du premier Empire et, dans un angle, une haie de queues blanches, à dessins marron.

Un nuage de fumée emplissait la pièce ; presque tous les paysans se sortaient de la bouche, les jeunes, des cigarettes, et les vieux, des tronçons culottés de pipes.

Jacques les contempla ; au fond, tous se ressemblaient ; les vieux avaient des tignasses sèches,