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ENQUÊTE

M. G. ALBERT AURIER


Auteur de Vieux, un roman où l’on sent encore, chose rare parmi les derniers venus, l’influence très directe de Balzac. Dès avant la publication de ce roman, qui est une œuvre de prime jeunesse, il semblait s’être dégagée de cette influence, et ses plus récentes productions de poète et de critique, qu’on peut suivre dans le Mercure de France, le montrent rallié au mouvement symboliste. Quelques articles de critique très remarqués de ceux qui suivent les « Petites Revues », et l’universelle confiance que ses amis ont en son avenir, me l’ont désigné parmi les jeunes qu’il fallait appeler à témoigner en cette enquête.

M. Albert Aurier a vingt-six ans environ, de très haute taille, le dos un peu voûté comme par une gêne d’être si grand, une tête très développée, aux traits doux et fins, il a l’expression mélancolique et sereine d’une figure de vitrail, que complètent, dans la rue, comme d’un nimbe, ses longs cheveux et les larges bords plats de son chapeau, toujours incliné en arrière.

— Le naturalisme est-il mort ?

— Je crois, vraiment, qu’il agonise et ma joie en est grande… Ou plutôt, non : ce qui en train de mourir, ce n’est pas le naturalisme, c’est l’École naturaliste et l’inconcevable engouement du public