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LE TRÉSOR DE BIGOT



I

CHAMPLAIN-TRICENTENAIRE


— Voyons, Tricentenaire, ne te fâche donc pas pour pareille vétille !

— Mais ce sale « habitant » nous a volé notre tour.

— Qu’importe ! Si nous perdons ce bateau, nous prendrons le suivant. Ce n’est qu’un quart d’heure d’attente. Juste le temps de griller un autre « clou de cercueil ».

Le jeune homme assis à l’avant d’un spacieux Sedan Buick sortit un riche étui à cigarettes de sa poche de veston, choisit une « Mogul » à bout de liège, la frappa de l’index à trois ou quatre reprises pour en chasser les grains de tabac qui eussent agacé sa langue et la porta à sa bouche d’un mouvement un peu pédant.

Puis il éclata de rire en regardant Tricentenaire qui le fixait d’un air ébahi !

— Qu’est-ce qui t’étonne en moi, jeune homme ? questionna-t-il.

— C’est, votre calme constant, éternel. Le mois dernier, après l’accident d’automobile terrible que nous avons eu, vous vous êtes relevé, vous avez regardé la machine capotée, puis vous avez silencieusement allumé une cigarette, tout comme vous venez de le faire. Ah ! ce calme, ce calme me donne envie de me battre, moi !

Après avoir paisiblement tiré une bouffée de sa « Mogul », l’autre répondit :

— Je me demande, Tricentenaire, pourquoi on t’a appelé ainsi. Loin d’avoir 300 ans, ton tempérament vif me prouve que tu es bien plus jeune que ton âge. Nous avons encore dix minutes à attendre. Le bateau est au milieu du St-Laurent. Tu as bien le temps de me dire pourquoi tes parents