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de Morale.

cette vertu, sont la seule raison du mérite qu’on y attache.

Supposons que la nature eût accordé au genre humain les commodités & les avantages extérieurs en si grande abondance que, sans crainte pour l’avenir, sans soin ni industrie de notre part, chaque individu se trouvât amplement pourvû de tout ce que l’imagination la plus ardente & les appétits les plus démesurés pourroient lui faire désirer ; supposons que sa beauté soit au-dessus de tous les embellissemens de l’art : que la douceur perpétuelle des saisons lui rende les vêtemens inutiles : que les plantes sans assaisonnement lui fournissent les mets les plus délicieux : que les eaux limpides des fontaines lui présentent le breuvage le plus exquis : qu’il n’ait besoin d’aucune occupation laborieuse : qu’il ne connoissent ni agriculture, ni navigation ; la musique., la poésie & la contemplation seront son unique occupation : la conversation, la gaieté & l’amitié seront ses seuls amusemens.

Il paroît évident que, dans cet état heureux toutes les autres vertus sociales fleuriroient,