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Essais

Lorsque Phocion, ce héros si débonnaire & si modeste, fut conduit au supplice, il se tourna vers un des compagnons de son infortune qui déploroit la rigueur de son sort, n’est-il pas, lui dit-il, glorieux pour toi de mourir avec Phocion[1] ? Que l’on mette à côté de ce tableau celui que Tacite nous fait de Vitellius détrôné, cherchant à prolonger son ignominie par un honteux attachement à la vie, abandonné à la fureur d’une populace implacable qui le couvre de fange, l’accable de coups, & en lui tenant un poignard sur la gorge, le force à lever la tête, & à l’exposer à l’opprobre & aux insultes de tous les passans. Quelle infamie ! quelle bassesse ! Cependant l’historien nous apprend qu’au milieu de cet horrible avilissement, il donna encore quelques foibles étincelles d’un esprit qui n’étoit point entié-

    qui la menacent, elle lui demande ce qu’elle peut opposer à tant d’ennemis ; moi, replique-t’elle, moi, dit-je c’est assez : Boileau regarde avec raison cette réponse comme un exemple vraiment sublime.

  1. Plutarque dans la vie de Phocion.