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Essais

ment à procurer le bien public ni à s’attirer l’estime des autres, nous en sommes moins jaloux, & nous ne faisons point difficulté de les ranger au nombre des vertus. Après cela la route est applanie, & il est clair que nous ne pouvons nous dispenser d’admettre dans le même rang la bienveillance gratuite, l’amour de la patrie & de l’humanité.

Il paroît en effet qu’en ceci comme en tout autre chose, les apparences peuvent être trompeuses, & il est plus difficile en spéculation de chercher, dans le principe de l’amour propre, le cas que nous faisons des vertus privées dont nous avons parlé, que l’estime que nous portons aux vertus sociales, telles que la justice & la bienfaisance. Quant aux dernières, on peut dire que toute conduite ou toute action qui contribue au bien de la société, est aimée, louée estimée par la société à cause de l’utilité que chacun en retire ; il est vrai que ce sentiment ou cette estime est réellement de la reconnoissance & non de l’amour-propre, mais cette distinction, quelque naturelle qu’elle soit, ne sera point faite par des rai-