Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 3, 1788.djvu/122

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
114
Histoire naturelle.

doit sa principale origine aux craintes que l’avenir inspire. On peut juger quelles idées les hommes doivent se faire d’un pouvoir invisible & inconnu ; tandis que tout les fait trembler, & que leur esprit n’est rempli que de sinistres événemens. Tout ce que la malice, la sévérité, la vengeance, la cruauté ont de plus affreux, vient se peindre, des traits les plus noirs, dans l’ame sombre du dévot, & augmenter l’horreur dont elle est pénétrée. En proie à mille terreurs paniques, dont une imagination vive lui multiplie les objets : dans ces profondes ténebres, ou, ce qui pis est, dans ce foible crépuscule dont il est environné, la Divinité se présente à lui comme un spectre revêtu de la forme la plus épouvantable ; il n’y a point de trait de méchanceté dont il ne la croie capable, & que dans ses accès de frayeur il ne lui attribue en effet sans le moindre scrupule.

Tel paroît être l’état naturel de la religion, envisagée par une de ses faces ; mais elle en présente encore une autre. Si nous considérons ce goût pour l’exagération & la flatterie qui se manifeste dans tous les systêmes reli-