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De La Religion.

point été généralement reçue parmi ses compatriotes & les contemporains ?

Tite-Live reconnoît, comme seroit un théologien de nos jours, que l’irréligion est devenue fort commune ; mais il la condamne avec la même sévérité[1] : le peuple pouvoit-il être exempt des superstitions qui en imposoient à un si grand homme ?

Les Stoïciens donnoient à leur sage les épithetes les plus sublimes, qui tenoient même de la profanation : il n’y avoit que lui qu’on pût nommer riche, libre, souverain ; il étoit égal aux immortels : ils oublièrent d’ajouter que, pour l’esprit & le bon sens, il en avoit pour le moins autant qu’une vieille femme. Rien n’est plus pitoyable que de voir cette secte, imbue des plus basses superstitions, & respectant toutes les sottises que les augures ont imaginées, prenant le corbeau qui croasse du côté gauche pour un mauvais pronostic, & le cri de la corneille qui se fait entendre du même côté, pour un présage du bonheur.

  1. L. X, c. 20.