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de fumée lugubre ; il en sort des rayons pour la liberté, pour la probité, pour l’héroïsme, et l’on dirait qu’il jette jusque dans notre civilisation des esprits pleins de sa lumière. Qu’est-ce que Régnier ? qu’est-ce que d’Aubigné ? qu’est-ce que Corneille ? Des étincelles de Juvénal.

§ VIII

L’autre, Tacite, est l’historien. La liberté s’incarne en lui comme en Juvénal, et monte, morte, au tribunal, ayant pour toge son suaire, et cite à sa barre les tyrans. L’âme d’un peuple devenue l’âme d’un homme, c’est Juvénal ; nous venons de le dire ; c’est aussi Tacite. A côté du poëte condamnant, se dresse l’historien puissant. Tacite, assis sur la chaise curule du génie, mande et saisit dans leur flagrant délit ces coupables, les Césars. L’empire romain est un long crime. Ce crime commence par quatre démons, Tibère, Caligula, Claude, Néron. Tibère, l’espion empereur ; l’œil qui guette le monde ; le premier dictateur qui ait osé détourner pour soi la loi de majesté faite pour le peuple romain ; sachant le