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dans l’airain de laquelle sont fondues Athènes et Sparte. De là, dans son vers, quelque chose d’Aristophane et quelque chose de Lycurgue. Prenez garde à lui ; c’est le sévère. Pas une corde ne manque à cette lyre, ni à ce fouet. Il est haut, rigide, austère, éclatant, violent, grave, juste, inépuisable en images, âprement gracieux, lui aussi, quand bon lui semble. Son cynisme est l’indignation de la pudeur. Sa grâce, tout indépendante, et figure vraie de la liberté, a des griffes ; elle apparaît tout à coup, égayant par on ne sait quelles souples et fières ondulations la majesté rectiligne de son hexamètre ; on croit voir le chat de Corinthe rôder sur le fronton du Parthénon. Il y a de l’épopée dans cette satire ; ce que Juvénal a dans la main, c’est le sceptre d’or dont Ulysse frappait Thersite. Enflure, déclamation ",. exagération, hyperbole ! crient les difformités meurtries, et ces cris, stupidement répétés par les rhétoriques, sont un bruit de gloire. — Le crime est égal de commettre ces choses ou de les raconter, disent Tillemont, Marc Muret, Garasse, etc., des niais, qui, comme Muret, sont parfois des drôles. L’invective de Juvénal flamboie depuis deux mille ans, effrayant incendie de poésie qui brûle Rome en présence des siècles. Ce foyer splendide éclate et, loin de diminuer avec le temps, s’accroît sous un tourbillonnement