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voilà le courtisan. Ceci fait éclater le rire de Voltaire et notre sanglot à nous. Ah ! Ézéchiel, tu te dévoues jusque-là. Tu rends la honte visible par l’horreur, tu forces l’ignominie à détourner la tête en se reconnaissant dans l’ordure, tu montres qu’accepter un homme pour maître, c’est manger le fumier, tu fais frémir les lâches de la suite du prince en mettant dans ton estomac ce qu’ils mettent dans leur âme, tu prêches la délivrance par le vomissement, sois vénéré ! Cet homme, cet être, cette figure, ce porc prophète, est sublime. Et la transfiguration qu’il annonce, il la prouve. Comment ? En se transfigurant lui-même. De cette bouche horrible et souillée sort un éblouissement de poésie. Jamais plus grand langage n’a été parlé, et plus extraordinaire : « Je vis des visions de Dieu. Un vent de tempête venait de l’aquilon, et une grosse nuée, et un feu s’entortillant. Je vis un char, et une ressemblance de quatre animaux. Au-dessus des animaux et du char était une étendue semblable à un cristal terrible. Les roues du char étaient faites d’yeux et si hautes qu’on avait peur. Le bruit des ailes des quatre anges était comme le bruit du Tout-Puissant, et quand ils s’arrêtaient ils baissaient leurs ailes. Et je vis une ressemblance qui était comme une apparence de feu, et qui avança une