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fumier féconde, ô Dante, il faut que leur enfer s’éteigne, ô Isaïe, ta Babylone s’écroule, il faut que la leur s’éclaire ! Ils font ce que vous avez fait ; ils contemplent directement la création, ils observent directement l’humanité ; ils n’acceptent pour clarté dirigeante aucun rayon réfracté, pas même le vôtre. Ainsi que vous, ils ont pour seul point de départ, en dehors d’eux, l’être universel, en eux, leur âme ; ils ont pour source de leur œuvre la source unique, celle d’où coule la nature et celle d’où coule l’art : l’infini. Comme le déclarait il y a quarante ans tout à l’heure[1] celui qui écrit ces lignes : les poètes et les écrivains du dix-neuvième siècle n’ont ni maîtres, ni modèles. Non, dans tout cet art vaste et sublime de tous les peuples, dans toutes ces créations grandioses de toutes les époques, non, pas même toi, Eschyle, pas même toi, Dante, pas même toi, Shakespeare, non, ils n’ont ni modèles ni maîtres. Et pourquoi n’ont-ils ni maîtres ni modèles ? C’est parce qu’ils ont un modèle, l’Homme, et parce qu’ils ont un maître, Dieu.

  1. Préface de Cromwell.