Page:Hugo - William Shakespeare, 1864.djvu/493

Cette page n’a pas encore été corrigée

En revanche, pour Shakespeare, « un peu païen, comme tous les poëtes » (REV. JOHN WHEELER), le puritanisme a l’ouïe délicate. Intolérance et inconséquence sont sœurs. D’ailleurs, quand il s’agit de proscrire et de damner, la logique est de trop. Lorsque Shakespeare, par la bouche d’Othello, appelle Desdemona whore, indignation générale, révolte unanime, scandale de fond en comble, qu’est-ce que c’est donc que ce Shakespeare ? toutes les sectes bibliques se bouchent les oreilles, sans songer qu’Aaron adresse exactement la même epithète à Séphora, femme de Moïse. Il est vrai que c’est dans un apocryphe, la Vie de Moïse. Mais les apocryphes sont des livres tout aussi authentiques que les canoniques.

De là en Angleterre, pour Shakespeare, un fond de froideur irréductible. Ce qu’Elisabeth a été pour Shakespeare, l’Angleterre l’est encore. Nous le craignons du moins. Nous serions heureux d’être démenti. Nous sommes pour la gloire de l’Angleterre plus ambitieux que l’Angleterre elle-même. Ceci ne peut lui déplaire.

L’Angleterre a une bizarre institution, « le poëte lauréat », laquelle constate les admirations officielles et un peu les admirations nationales. Sous Elisabeth, et pendant Shakespeare, le poëte d’Angleterre se nommait Drummond.