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aphorisme est, à ce qu’on nous assure, un des hauts personnages du jour. Nous n’y faisons point d’objection. Les grandeurs ne diminuent pas les oreilles.

Octave-Auguste, le matin de la bataille d’Actium, rencontra un âne que Panier appelait Triumphus ; ce Triumphus doué de la faculté de braire lui parut de bon augure ; Octave-Auguste gagna la bataillé, se souvint de Triumphus, le fit sculpter en bronze et le mit au Capitole. Cela fit un âne capitolin, mais un âne.

On comprend que les rois disent au poëte : Sois inutile ; mais on ne comprend pas que les peuples le lui disent. C’est pour le peuple qu’est le poëte. Pro populo poeta, écrivait Agrippa d’Aubigné. Tout à tous, criait saint Paul. Qu’est-ce qu’un esprit ? C’est un nourrisseur d’âmes. Le poëte est à la fois fait de menace et de promesse. L’inquiétude qu’il inspire aux oppresseurs apaise et console les opprimés. C’est la .gloire du poëte de mettre un mauvais oreiller au lit de pourpre des bourreaux. C’est souvent grâce à lui que le tyran se réveille en disant : J’ai mal dormi. Tous les esclavages, tous les accablements, toutes les douleurs, toutes les infortunes, toutes les détresses, toutes les faims et toutes les soifs, ont droit au poëte ; il a un créancier, le genre humain.