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dans l’incomplet. Tout, pour n’être rien. Il est prince et démagogue, sagace et extravagant, profond et frivole, homme et neutre. Il croit peu au sceptre, bafoue le trône, a pour camarade un étudiant, dialogue avec les passants, argumente avec le premier venu, comprend le peuple, méprise la foule, hait la force, soupçonne le succès, interroge l’obscurité, tutoie le mystère. Il donne aux autres des maladies qu’il n’a pas ; sa folie fausse inocule à sa maîtresse une folie vraie. Il est familier avec les spectres et avec les comédiens. Il bouffonne, la hache d’Oreste à la main. Il parle littérature, récite des vers, fait un feuilleton de théâtre, joue avec des os dans un cimetière, foudroie sa mère, venge son père, et termine le redoutable drame de la vie et de la mort par un gigantesque point d’interrogation. Il épouvante, puis déconcerte. Jamais rien de plus accablant n’a été rêvé. C’est le parricide disant : que sais-je ?

Parricide ? Arrêtons-nous sur ce mot. Hamlet est-il parricide ? Oui et non. Il se borne à menacer sa mère ; mais la menace est si farouche que la mère frissonne. — « Ta parole est un poignard !... Que veux-tu « faire ? veux-tu donc m’assassiner ? au secours ! au secours ! hola ! » et quand elle meurt, Hamlet, sans la plaindre, frappe Claudius avec ce cri tragique : Suis ma