Page:Hugo - William Shakespeare, 1864.djvu/308

Cette page n’a pas encore été corrigée

fait que l’avare, le génie fait Harpagon ; Dieu ne fait que le traître, le génie fait Iago ; Dieu ne fait que la coquette, le génie fait Célimène ; Dieu ne fait que le roi, le génie fait Grandgousier. Quelquefois, à un moment donné, le type sort tout fait d’on ne sait quelle collaboration du peuple en masse avec un grand comédien naïf, réalisateur involontaire et puissant ; la foule est sage-femme ; d’une époque qui porte à l’une de ses extrémités Talleyrand et à l’autre Chodruc-Duclos, jaillit tout à coup, dans un éclair, sous la mystérieuse incubation du théâtre, ce spectre, Robert Macaire.

Les types vont et viennent de plain-pied dans l’art et dans la nature. Ils sont de l’idéal réel. Le bien et le mal de l’homme sont dans ces figures. De chacun d’eux découle, au regard du penseur, une humanité.

Nous l’avons dit, autant de types, autant d’Adams. L’homme d’Homère, Achille, est un Adam ; de lui vient l’espèce des tueurs ; l’homme d’Eschyle, Prométhée, est un Adam ; de lui vient la race des lutteurs ; l’homme de Shakespeare, Hamlet, est un Adam ; à lui se rattache la famille des rêveurs. D’autres Adams, créés par les poètes, incarnent, celui-ci la passion, celui-là le devoir, celui-là la raison, celui-là la conscience,