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certificat : « Son style a ce grand mérite de ne pas contenir de comparaisons. » Nous avons vu de nos jours cet éloge singulier se reproduire. Ceci nous rappelle qu’un fort professeur de la restauration, indigné des comparaisons et des figures qui abondent dans les prophètes, écrasait Isaïe, Daniel et Jérémie sous cet apophthegme profond : Toute la Bible est dans comme. Un autre, plus professeur encore, disait ce mot, resté célèbre à l’École normale : Je rejette Juvénal au fumier romantique. Quel était le crime de Juvénal ? Le même que le crime d’Isaïe. Exprimer volontiers l’idée par l’image. En reviendrions-nous peu à peu, dans les régions doctes, à la métonymie terme de chimie, et à l’opinion de Pradon sur la métaphore ?

On dirait, aux réclamations et clameurs de l’école doctrinaire, que c’est elle qui est chargée de fournir à ses frais à toute la consommation d’images et de figures que peuvent faire les poètes, et qu’elle se sent ruinée par des gaspilleurs comme Pindare, Aristophane, Ézéchiel, Plaute et Cervantes. Cette école met sous clef les passions, les sentiments, le cœur humain, la réalité, l’idéal, la vie. Effarée, elle regarde les génies en cachant tout, et elle dit : Quels goinfres ! Aussi est-ce elle qui a inventé pour les écrivains cet éloge superlatif : il est tempéré.