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Un des grands côtés de cette délivrance de l’homme par l’imprimerie, c’est, insistons-y, la conservation indéfinie des poètes et des philosophes. Gutenberg est comme le second père des créations de l’esprit. Avant lui, oui, ceci était possible, un chef-d’œuvre mourait.

Chose lamentable à dire, la Grèce et Rome ont laissé des ruines de livres. Toute une façade de l’esprit humain à demi écroulée, voilà l’antiquité. Ici la masure d’une épopée, là une tragédie démantelée ; de grands vers frustes enfouis et défigurés, des frontons d’idées aux trois quarts tombés, des génies tronqués comme des colonnes, des palais de pensée sans plafond et sans porte, des ossements de poëmes, une tête de mort qui a été une strophe, l’immortalité en décombres. On rêve sinistrement. L’oubli, cette araignée, suspend sa toile entre le drame d’Eschyle et l’histoire de Tacite.

Où est Eschyle ? en morceaux partout. Eschyle est épars dans vingt textes. Sa ruine, c’est dans une multitude d’endroits différents qu’il faut la chercher. Athénée donne la dédicace Au Temps, Macrobe le fragment de l’Etna et l’hommage aux dieux Paliques, Pausanias l’épitaphe, le biographe anonyme, Goltzius et Meursius ; les titres des pièces perdues.

On sait par Cicéron, dans les Tusculanes,