Page:Hugo - Les Travailleurs de la mer Tome I (1891).djvu/77

Cette page a été validée par deux contributeurs.


XX

HOMO EDAX


Dans un temps donné la configuration d’une île change. Une île est une construction de l’océan. La matière est éternelle, non l’aspect. Tout sur la terre est perpétuellement pétri par la mort, même les monuments extra-humains, même le granit. Tout se déforme, même l’informe. Les édifices de la mer s’écroulent comme les autres.

La mer qui les a élevés, les renverse.

En quinze cents ans, seulement entre l’embouchure de l’Elbe et l’embouchure du Rhin, sept îles sur vingt-trois ont sombré. Cherchez-les au fond de la mer. C’est au treizième siècle que la mer a fait le Zuyderzée ; c’est au quinzième qu’elle a créé la baie de Bies-Bosch en supprimant vingt-deux villages ; c’est au seizième qu’elle a improvisé le golfe de Dollart, en engloutissant Torum. Il y a cent ans, devant le Bourgdault, aujourd’hui coupé à pic sur la falaise normande, on voyait encore sous les vagues le clocher de l’ancien Bourgdault submergé. À Écré-Hou, on distingue, dit-