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LES TRAVAILLEURS DE LA MER

Quoi qu’il en soit, si cette maison a des aventures, c’est son affaire ; à part quelques hasards et quelques exceptions, nul n’y va voir, elle est laissée seule ; il n’est du goût de personne de se risquer aux rencontres infernales.

Grâce à la terreur qui la garde, et qui en éloigne quiconque pourrait observer et témoigner, il a été de tout temps facile de s’introduire la nuit dans cette maison, au moyen d’une échelle de corde, ou même tout simplement du premier échalier venu pris aux courtils voisins. Un en-cas de hardes et de vivres apporté là permettrait d’y attendre en toute sécurité l’éventualité et l’à-propos d’un embarquement furtif. La tradition raconte qu’il y a une quarantaine d’années, un fugitif, de la politique selon les uns, du commerce selon les autres, a séjourné quelque temps caché dans la maison visionnée de Plainmont, d’où il a réussi à s’embarquer sur un bateau pêcheur pour l’Angleterre. D’Angleterre on gagne aisément l’Amérique.

Cette même tradition affirme que des provisions déposées dans cette masure y demeurent sans qu’on y touche ; Lucifer, comme les contrebandiers, ayant intérêt à ce que celui qui les a mises là revienne.

Du sommet où est cette maison, on aperçoit au sud-ouest, à un mille de la côte, l’écueil des Hanois.

Cet écueil est célèbre. Il a fait toutes les mauvaises actions que peut faire un rocher. C’était un des plus redoutables assassins de la mer. Il attendait en traître les navires dans la nuit. Il a élargi les cimetières de Torteval et de la Rocquaine.

En 1862 on a placé sur cet écueil un phare.