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LES TRAVAILLEURS DE LA MER

Cette échelle, qui sort de terre, se continue dans le bleu. Toute la hiérarchique Angleterre y entre et s’y étage. En voici les échelons, de plus en plus lumineux : au-dessus du monsieur gentleman, il y a l’esq. (écuyer), au-dessus de l’esq., le chevalier (sir viager), puis, en s’élevant toujours, le baronet (sir héréditaire), puis le lord, laird en écosse, puis le baron, puis le vicomte, puis le comte (earl en Angleterre, jarl en Norvège), puis le marquis, puis le duc, puis le pair d’Angleterre, puis le prince du sang royal, puis le roi. Cette échelle monte du peuple à la bourgeoisie, de la bourgeoisie au baronetage, du baronetage à la pairie, de la pairie à la royauté.

Grâce à son coup de tête réussi, grâce à la vapeur, grâce à sa machine, grâce au Bateau-Diable, mess Lethierry était devenu quelqu’un. Pour construire « la galiote », il avait dû emprunter ; il s’était endetté à Brême, il s’était endetté à Saint-Malo ; mais chaque année il amortissait son passif.

Il avait de plus acheté à crédit, à l’entrée même du port de Saint-Sampson, une jolie maison de pierre, toute neuve, entre mer et jardin, sur l’encoignure de laquelle on lisait ce nom : les Bravées. le logis les Bravées, dont la devanture faisait partie de la muraille même du port, était remarquable par une double rangée de fenêtres, au nord, du côté d’un enclos plein de fleurs, au sud, du côté de l’océan ; de sorte que cette maison avait deux façades, l’une sur les tempêtes, l’autre sur les roses.

Ces façades semblaient faites pour les deux habitants, mess Lethierry et miss Déruchette.

La maison des Bravées était populaire à Saint-Sampson.