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— Où donc est Thèbes ? dit Babylone pensive.
Thèbes demande : — Où donc est Ninive ? et Ninive
S’écrie : — Où donc est Tyr ?

En laissant fuir les mots de sa langue prolixe,
L’homme s’agite et va, suivi par un œil fixe ;
Dieu n’ignore aucun toit ;
Tous les jours d’ici-bas ont des aubes funèbres ;
Malheur à ceux qui font le mal dans les ténèbres ;
En disant : Qui nous voit ?

Tous tombent ; l’un au bout d’une course insensée,
L’autre à son premier pas ; l’homme sur sa pensée,
La mère sur son nid ;
Et le porteur de sceptre et le joueur de flûte
S’en vont ; et rien ne dure ; et le père qui lutte
Suit l’aïeul qui bénit.

Les races vont au but qu’ici-bas tout révèle.
Quand l’ancienne commence à pâlir, la nouvelle
A déjà le même air ;
Dans l’éternité, gouffre où se vide la tombe,
L’homme coule sans fin, sombre fleuve qui tombe
Dans une sombre mer.

Tout escalier, que l’ombre ou la splendeur le couvre,
Descend au tombeau calme, et toute porte s’ouvre
Sur le dernier moment ;
Votre sépulcre emplit la maison où vous êtes ;
Et tout plafond, croisant ses poutres sur nos têtes,
Est fait d’écroulement.

Veillez ! veillez ! Songez à ceux que vous perdîtes ;
Parlez moins haut, prenez garde à ce que vous dites,
Contemplez à genoux ;