Page:Hugo - Les Contemplations, Nelson, 1856.djvu/116

Cette page a été validée par deux contributeurs.

XX

IL FAIT FROID

L’hiver blanchit le dur chemin.
Tes jours aux méchants sont en proie.
La bise mord ta douce main,
La haine souffle sur ta joie.

La neige emplit le noir sillon.
La lumière est diminuée…
Ferme ta porte à l’aquilon !
Ferme ta vitre à la nuée !

Et puis laisse ton cœur ouvert !
Le cœur, c’est la sainte fenêtre.
Le soleil de brume est couvert ;
Mais Dieu va rayonner peut-être !

Doute du bonheur, fruit mortel,
Doute de l’homme plein d’envie,
Doute du prêtre et de l’autel,
Mais crois à l’amour, ô ma vie !

Crois à l’amour, toujours entier,
Toujours brillant sous tous les voiles !
À l’amour, tison du foyer !
À l’amour, rayon des étoiles !

Aime, et ne désespère pas.
Dans ton âme où parfois je passe,
Où mes vers chuchotent tout bas,
Laisse chaque chose à sa place.