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Son dessous effrayant, ses trous, ses entonnoirs,
Où l’ombre se fait onde, où vont des fleuves noirs,
Où le volcan, noyé sous d’affreux lacs, regrette
La montagne, son casque, et le feu, son aigrette,
Où l’on distingue, au fond des gouffres inouïs,
Les vieux enfers éteints des dieux évanouis.
Il dit la séve ; il dit la vaste plénitude
De la nuit, du silence et de la solitude,
Le froncement pensif du sourcil des rochers ;
Sorte de mer ayant les oiseaux pour nochers,
Pour algue le buisson, la mousse pour éponge,
La végétation aux mille têtes songe ;
Les arbres pleins de vent ne sont pas oublieux ;
Dans la vallée, au bord des lacs, sur les hauts lieux,
Ils gardent la figure antique de la terre ;
Le chêne est entre tous profond, fidèle, austère ;
Il protége et défend le coin du bois ami
Où le gland l’engendra, s’entr’ouvrant à demi,
Où son ombrage attire et fait rêver le pâtre.
Pour arracher de là ce vieil opiniâtre,
Que d’efforts, que de peine au rude bûcheron !
Le sylvain raconta Dodone et Cithéron,
Et tout ce qu’aux bas-fonds d’Hémus, sur l’Érymanthe
Sur l’Hymète, l’autan tumultueux tourmente ;
Avril avec Tellus pris en flagrant délit,
Les fleuves recevant les sources dans leur lit,
La grenade montrant sa chair sous sa tunique,
Le rut religieux du grand cèdre cynique,