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Et si ce qui dans l’ombre indistincte surnage
Est la fin d’un festin ou la fin d’un carnage.

Par moments le tambour, le cistre, le clairon,
Font ces rages de bruit qui rendaient fou Néron.
Ce tumulte rugit, chante, boit, mange, râle.
Sur un trône est assis Ratbert, content et pâle.

C’est, parmi le butin, les chants, les arcs de fleurs,
Dans un antre de rois un Louvre de voleurs.

Presque nue au milieu des montagnes de roses,
Comme les déités dans les apothéoses,
Altière, recevant vaguement les saluts,
Marquant avec ses doigts la mesure des luths,
Ayant dans le gala les langueurs de l’alcôve,
Près du maître sourit Matha, la blonde fauve ;
Et sous la table, heureux, du genou la pressant,
Le roi cherche son pied dans les mares de sang.

Les grands brasiers, ouvrant leur gouffre d’étincelles,
Font resplendir les ors d’un chaos de vaisselles ;
On ébrèche aux moutons, aux lièvres montagnards,
Aux faisans, les couteaux tout à l’heure poignards ;