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LA LÉGENDE DES SIÈCLES.

Zéno lui prend la main qui retombe.

Zéno lui prend la main qui retombe. « Elle dort !
Dit Zéno ; maintenant, vite, tirons au sort.
D’abord à qui l’état ? Ensuite, à qui la fille ? »

Dans ces deux profils d’homme un œil de tigre brille.

« Frère, dit Joss, parlons politique à présent.
La Mahaud dort et fait quelque rêve innocent ;
Nos griffes sont dessus. Nous avons cette folle.
L’ami de dessous terre est sûr et tient parole ;
Le hasard, grâce à lui, ne nous a rien ôté
De ce que nous avons construit et comploté ;
Tout nous a réussi. Pas de puissance humaine
Qui nous puisse arracher la femme et le domaine.
Concluons. Guerroyer, se chamailler pour rien,
Pour un oui, pour un non, pour un dogme arien
Dont le pape sournois rira dans la coulisse,
Pour quelque fille ayant une peau fraîche et lisse,
Des yeux bleus et des mains blanches comme le lait ;
C’était bon dans le temps où l’on se querellait
Pour la croix byzantine ou pour la croix latine,
Et quand Pépin tenait un synode à Leptine,
Et quand Rodolphe et Jean, comme deux hommes soûls,
Glaive au poing, s’arrachaient leur Agnès de deux sous ;