Page:Hugo - La Légende des siècles, 1e série, édition Hetzel, 1859, tome 1.djvu/207

Cette page a été validée par deux contributeurs.
181
ÉVIRADNUS.

Dieu dans son harmonie également emploie
Le cèdre qui résiste et le roseau qui ploie,
Et, certes, il est bon qu’une femme parfois
Ait dans sa main les mœurs, les esprits et les lois,
Succède au maître altier, sourie au peuple, et mène,
En lui parlant tout bas, la sombre troupe humaine ;
Mais la douce Mahaud, dans ces temps de malheur,
Tient trop le sceptre, hélas ! comme on tient une fleur ;
Elle est gaie, étourdie, imprudente et peureuse.
Toute une Europe obscure autour d’elle se creuse ;
Et, quoiqu’elle ait vingt ans, on a beau la prier,
Elle n’a pas encor voulu se marier.
Il est temps cependant qu’un bras viril l’appuie ;
Comme l’arc-en-ciel rit entre l’ombre et la pluie,
Comme la biche joue entre le tigre et l’ours,
Elle a, la pauvre belle aux purs et chastes jours,
Deux noirs voisins qui font une noire besogne :
L’empereur d’Allemagne et le roi de Pologne.


V

Les deux voisins



Toute la différence entre ce sombre roi
Et ce sombre empereur, sans foi, sans Dieu, sans loi,