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L’antre, où les noirs arrêts dans l’ombre étaient écrits,
Semblait la bouche ouverte encor pleine de cris ;
Les monts sortaient de l’eau comme une épaule nue.
Comme l’onde qui bout dans l’airain diminue,
L’océan s’en allait, laissant des lacs amers.
Ces quelques flaques d’eau sont aujourd’hui nos mers.
Tout ce que le flot perd, la nature le gagne.
L’île s’élargissant se changeait en montagne ;
Les archipels grandis devenaient continents.
De son dos monstrueux poussant leurs gonds tournants,
Le déluge fermait ses invisibles portes.
Les ténèbres dormaient sur les profondeurs mortes,
Et laissaient distinguer à peine l’ossement
Du monde, que les eaux découvraient lentement.
Soudain, réverbérée au vague front des cimes,
Une lueur de sang glissa sur les abîmes ;
On vit à l’horizon lugubrement vermeil
Poindre une lune rouge, et c’était le soleil.

Pendant quarante jours et quarante nuits sombres,
La mer, laissant à nu d’effroyables décombres,
Recula, posant l’arche aux monts près d’Henocha,
Puis ce lion, rentré dans l’antre, se coucha.