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Je l’aime. C’est fini. — Lumière ; fiancée
De tout esprit ; soleil ! feu de toute pensée ;
Vie ! où donc êtes-vous ; Je vous cherche. O tourment !
La création vit dans l’éblouissement ;
O regard éclatant de l’aube idolâtrée,
Rayon dont la nature est toute pénétrée !
Les fleuves sont joyeux dans l’herbe ; l’horizon
Resplendit ; le vent court ; des fleurs plein le gazon,
Des oiseaux, des oiseaux, et des oiseaux encore ;
Tout cela chante, rit, aime, inondé d’aurore ;
Le tigre dit : et moi ! je veux ma part du ciel ! —
L’aube dore le tigre et l’offre à l’Eternel.

Moi seul je reste affreux ! Hélas, rien n’est immonde.
Moi seul, je suis la honte et la tache du monde.
Ma laideur, vague effroi des astres soucieux,
Perce à travers ma nuit et va salir les cieux.
Je ne vois rien, étant maudit ; mais dans l’espace
J’entends, j’entends dans l’eau qui fuit, dans l’air qui passe,
J’entends dans l’univers ce murmure : va-t’en !
Le porc dit au fumier : je méprise Satan.
Je sens la nuit penser que je la déshonore.
Le tourbillonnement du grand souffle sonore,
Le vent du matin, libre et lâché dans le ciel,
Evite mon front morne et pestilentiel.