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O Balaath qu’emplit un peuple querelleur !
Malheur, Corozaïm ! Bethsaïde, malheur !
Parce que vous avez dédaigné mes oracles,
Parce que si j’avais fait les mêmes miracles,
Crié le même appel et le même pardon
Dans Ninive aux cent tours, dans Tyr et dans Sidon,
On aurait vu pleurer Ninive, et Tyr descendre
De son trône, et Sidon vêtir le sac de cendre !
C’est fini. Je vous vois désertes. Vous voilà
Muettes comme un lac dont toute l’eau coula.
Vos jardins ont l’odeur des charniers insalubres.
Tout croule. Vos palais sont devenus lugubres
Sous le passage obscur des châtiments divins ;
Ce sont des pans de mur inutiles et vains ;
Les mâchoires des morts ne sont pas plus terribles.
Malheur ! on ne voit plus le grain sortir des cribles ;
Plus de fille de joie assise sur son lit ;
On n’entend plus cracher les passants ; l’herbe emplit
Les sentiers que suivaient les mulets et les zèbres.
Le plein midi ne fait qu’augmenter vos ténèbres ;
On a beau peindre en blanc le sépulcre, il est noir.
Le soleil est présent à votre désespoir ;
Vos décombres sont pleins d’antres épouvantables.
O Moïse, ils ont fait une fêlure aux tables,
Ils ont brisé la loi ; c’est bien, mourez. Assez !
Vous serez si tremblants, peuples, et si chassés
Que vous ferez sous terre une seconde ville.
Comme sous le pressoir on voit déborder l’huile,
Le sang en longs ruisseaux jaillit sous le talon
Des princes écrasant Ruben et Zabulon ;