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Et le prêtre jeta trois grains d’encens dans l’âtre
Pour purifier l’air où l’homme avait parlé.

L’homme reprit :
                              - Un champ qui fait mourir le blé,
Qui n’a pas un rameau vivant où l’oiseau dorme,
Egout où du déluge on voit la boue énorme,
Est le lieu sombre où j’ai trouvé ce tronc hideux.
Les hommes d’autrefois ne pouvaient être deux
Sans combattre, et l’un l’autre ils se prenaient pour cible,
Et la marque d’un meurtre est sur cet arbre horrible.
Les géants de la race Énacim, qui d’abord
Ont habité la terre antique, ont fait la mort.
Leur ombre immense couvre encor les races neuves.
Ils écrasaient du pied les éléphants des fleuves
Devant qui la forêt monstrueuse se tait ;
Leur bâton de voyage ou de défense était
Un chêne qu’ils avaient cassé dans la clairière ;
Et nous pourrions bâtir toute une tour de pierre
Avec un des cailloux qu’ils tenaient dans leur poing.

— Oui, dit le docteur, Dieu qui ne s’égare point
En attendant le nombre, exagéra la forme ;
Le monde a commencé par la famille énorme ;
Du groupe gigantesque est né le genre humain ;
Le bloc d’hier sera tas de pierres demain ;
Un géant tient d’abord la place d’une foule ;