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VIII. LA SIBYLLE

 
La sibylle d’Achlab parle dans sa caverne ;
Elle est seule ; un esprit farouche la gouverne,
La courbe comme un feu sous un vol de démons,
Et de sa bouche obscure et de ses noirs poumons
Fait sortir le hasard des paroles terribles.
Des feuilles, qui plus tard s’iront coller aux Bibles,
S’échappent par moments de son antre, et s’en vont
En vagues flamboiements dans l’espace sans fond.
Elle les suit des yeux, et rit ; puis recommence,
L’immensité s’étant mêlée à sa démence,
Et le souffle infini la traversant toujours.
Elle s’adresse à l’ombre, au gouffre, aux rochers sourds.
Spectre par le regard, par la maigreur squelette,
Elle parle une langue étrange où se reflète
L’avenir, à demi visible sur son front,
Et prononce déjà des mots qui ne seront
Dits par le genre humain que dans trois mille années.