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boutique. Marchandez, c’est à vendre. En Angleterre, sous Jeffreys, après la tragique aventure de Monmouth, il y eut force seigneurs et gentilshommes décapités et écartelés ; ces suppliciés laissèrent des épouses et des filles, veuves et orphelines que Jacques II donna à la reine sa femme. La reine vendit ces ladies à Guillaume Penn. Il est probable que ce roi avait une remise et tant pour cent. Ce qui étonne, ce n’est pas que Jacques II ait vendu ces femmes, c’est que Guillaume Penn les ait achetées.

L’emplette de Penn s’excuse, ou s’explique, par ceci que Penn, ayant un désert à ensemencer d’hommes, avait besoin de femmes. Les femmes faisaient partie de son outillage.

Ces ladies furent une bonne affaire pour sa gracieuse majesté la reine. Les jeunes se vendirent cher. On songe, avec le malaise d’un sentiment de scandale compliqué, que Penn eut probablement de vieilles duchesses à très bon marché.

Les comprachicos se nommaient aussi « les cheylas », mot indou qui signifie dénicheurs d’enfants.