Page:Hugo - L'Art d'être grand-père, 1877.djvu/263

Cette page n’a pas encore été corrigée


Un jour, un frais matin quelconque, éblouissant,
Épousera cette aube encor pleine d’étoiles ;
Et quelque âme, à cette heure errante sous les voiles
Où l’on sent l’avenir en Dieu se reposer,
Profitera pour naître ici-bas d’un baiser
Que se donneront l’une à l’autre ces aurores.
Ô tendre oiseau des bois qui dans ton nid pérores,
Voix éparse au milieu des arbres palpitants
Qui chantes la chanson sonore du printemps
Ô mésange, ô fauvette, ô tourterelle blanche,
Sorte de rêve ailé fuyant de branche en branche,
Doux murmure envolé dans les champs embaumés,
Je t’écoute et je suis plein de songes. Aimez,
Vous qui vivrez ! Hymen ! chaste hymen ! O nature !
Jeanne aura devant elle alors son aventure,
L’être en qui notre sort s’accroît et s’interrompt ;
Elle sera la mère au jeune et grave front ;
La gardienne d’une aube à qui la vie est due,
Épouse responsable et nourrice éperdue,
La tendre âme sévère, et ce sera son tour
De se pencher, avec un inquiet amour,
Sur le frêle berceau, céleste et diaphane ;
Ma Jeanne, ô rêve ! azur ! contemplera sa Jeanne ;
Elle l’empêchera de pleurer, de crier,
Et lui joindra les mains, et la fera prier,
Et sentira sa vie à ce souffle mêlée.