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Blanchissent les corbeaux, noircissent les colombes,
Lapident un berceau que protège un linceul,
Blessent Dieu dans le peuple et l’enfant dans l’aïeul,
Les pères dans les fils, les hommes dans les femmes,
Et pensent qu’ils sont forts parce qu’ils sont infâmes !

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Nous les voyons s’ébattre au-dessus de Paris
Comme un troupeau d’oiseaux jetant au vent des cris,
Ou comme ce bon vieux télégraphe de Chappe
Faisant un geste obscur dont le sens nous échappe ;
Mais nous apercevons distinctement leur but.
L’opprobre que la France et que l’Europe but,
Ils veulent, meurtriers, nous le faire reboire.
Rome infaillible emploie à cela son ciboire.
Le sanglant droit divin, l’effrayant bon plaisir,
Le vice pour sultan, le crime pour visir,
Eux ayant le festin, le pauvre ayant les miettes,
L’espoir mort, la rentrée affreuse aux oubliettes,
Voilà leur rêve. Il faut pour vaincre jeter bas
Ce Christ, le peuple, et mettre au pavois Barabbas,
Il faut faire de tous et de tout table rase,
Il faut, si quelque front se dresse, qu’on l’écrase,
Il faut que le premier devienne le dernier,
Il faut jeter Voltaire et Jean-Jacque au panier !