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Mais il faut bien quelqu’un qui soit pour les étoiles !
Il faut quelqu’un qui soit pour la fraternité,
La clémence, l’honneur, le droit, la liberté,
Et pour la vérité, resplendissement sombre !
Les constellations sont sublimes dans l’ombre,
Elles reluisent, fleurs de l’éternel été ;
Mais elles ont besoin, dans leur sérénité,
Que l’univers guidé leur rende témoignage,
Et que, renouvelé sur terre d’âge en âge,
Un homme, rassurant ses frères condamnés,
Crie à travers la nuit : Astres, vous rayonnez !
Car rien ne serait plus effrayant que le crime,
La vertu, le rayon, l’ombre, égaux dans l’abîme ;
Rien n’accuserait Dieu plus que de la clarté
Perdue, éparse au fond des cieux sans volonté ;
Et rien ne prouverait là-haut plus de démence
Que l’inutilité de la lumière immense.
C’est pourquoi la justice est bonne, et l’astre est bon.
Dans vingt pays affreux, Soudan, Darfour, Gabon,
L’homme fut pris, lié, traîné, vendu de force,
Jusqu’au lever d’un astre appelé Wilberforce.
Etre juste, au hasard, dût-on être martyr,
Et laisser hors de soi la justice sortir,
C’est le rayonnement véritable de l’homme.
En quelque lieu qu’un acte inique se consomme,
Quel que soit le moment où le mal se construit,
Il faut qu’une voix parle, il faut que dans la nuit
On voie une lueur tout à coup apparaître.