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Ne m’admire quêtant des sous dans un plat rond,
La chape d’or au cou, la mitre d’or au front ;
Je ne fais point baiser ma main aux bonnes femmes ;
Je vénère le ciel, mais sans le vendre aux âmes ;
On ne m’appelle pas monseigneur ; je me plais
Dans les champs, et mes bas ne sont pas violets ;
Les fautes que je fais sont des fautes sincères ;
L’hypocrisie et moi sommes deux adversaires ;
Je crois ce que je dis, je fais ce que je crois ;
Je mets près de Socrate aux fers Jésus en croix ;
Lorsqu’un homme est traqué comme une bête fauve,
Fût-il mon ennemi, si je peux, je le sauve ;
Je méprise Basile et dédaigne Scapin ;
Je donne à l’enfant pauvre un morceau de mon pain ;
J’ai lutté pour le vrai, pour le bon, pour l’honnête,
Et j’ai subi vingt ans l’exil dans la tempête ;
Je recommencerai demain, si Dieu le veut ;
Ma conscience dit : — Marche ! — rien ne m’émeut,
J’obéis, et je vais, malgré les vents contraires,
Et je fais mon devoir ; et c’est pourquoi, mes frères,
Au dire du journal de l’évêque de Gand,
Si je n’étais un fou, je serais un brigand.