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DEPUIS L’EXIL. — BRUXELLES.

Jugez d’abord, puis condamnez, puis exécutez. Je pourrai blâmer, mais je ne flétrirai pas. Vous êtes dans la loi.

Si vous tuez sans jugement, vous assassinez.

Je reviens au gouvernement belge.

Il a tort de refuser l’asile.

La loi lui permet ce refus, le droit le lui défend.

Moi qui vous écris ces lignes, j’ai une maxime : Pro jure contra legem.

L’asile est un vieux droit. C’est le droit sacré des malheureux.

Au moyen âge, l’église accordait l’asile même aux parricides.

Quant à moi, je déclare ceci :

Cet asile, que le gouvernement belge refuse aux vaincus, je l’offre.

Où ? en Belgique.

Je fais à la Belgique cet honneur.

J’offre l’asile à Bruxelles.

J’offre l’asile place des Barricades, n° 4.

Qu’un vaincu de Paris, qu’un homme de la réunion dite Commune, que Paris a fort peu élue et que, pour ma part, je n’ai jamais approuvée, qu’un de ces hommes, fût-il mon ennemi personnel, surtout s’il est mon ennemi personnel, frappe à ma porte, j’ouvre. Il est dans ma maison ; il est inviolable.

Est-ce que, par hasard, je serais un étranger en Belgique ? je ne le crois pas. Je me sens le frère de tous les hommes et l’hôte de tous les peuples.

Dans tous les cas, un fugitif de la Commune chez moi, ce sera un vaincu chez un proscrit ; le vaincu d’aujourd’hui chez le proscrit d’hier.

Je n’hésite pas à le dire, deux choses vénérables.

Une faiblesse protégeant l’autre.

Si un homme est hors la loi, qu’il entre dans ma maison. Je défie qui que ce soit de l’en arracher.

Je parle ici des hommes politiques.