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LA NOËL À HAUTEVILLE-HOUSE

La page qui suit est extraite de la Gazette de Guernesey, en date du 29 décembre 1866 :

« Jeudi dernier, une foule élégante et distinguée se pressait chez M. Victor Hugo pour être témoin de la distribution annuelle de vêtements et de jouets que M. Victor Hugo fait aux petits enfants pauvres qu’il a pris sous ses soins. La fête se composait comme d’usage : 1o  d’un goûter de sandwiches, de gâteaux, de fruits et de vin ; 2o  d’une distribution de vêtements ; 3o  d’un arbre de Noël sur lequel étaient arrangées des masses de jouets. Avant la distribution de vêtements, M. Victor Hugo a adressé un speech aux personnes présentes. Voici le résumé de ce que nous avons pu recueillir :

« Mesdames,

« Vous connaissez le but de cette petite réunion. C’est ce que j’appelle, à défaut d’un mot plus simple, la fête des petits enfants pauvres. Je voudrais en parler dans les termes les plus humbles, je voudrais pouvoir emprunter pour cela la simplicité d’un des petits enfants qui m’écoutent.

« Faire du bien aux enfants pauvres, dans la mesure de ce que je puis, voilà mon but. Il n’y a aucun mérite, croyez-le bien, et ce que je dis là je le pense profondément, il n’y a aucun mérite à faire pour les pauvres ce que l’on peut ; car ce que l’on peut, c’est ce que l’on doit. Connaissez-vous quelque chose de plus triste que la souffrance des enfants ? Quand nous souffrons, nous hommes, c’est justement, nous avons ce que nous méritons, mais les enfants sont innocents, et l’innocence qui souffre, n’est-ce pas ce qu’il y a de plus de triste au monde ? Ici, la providence nous confie une partie de sa propre fonction. Dieu dit à l’homme, je te confie l’enfant. Il ne nous confie pas seulement nos propres enfants ; car il est trop simple d’en prendre soin, et les animaux s’acquittent de ce devoir de la nature mieux parfois que les hommes eux-mêmes ; il nous confie tous les enfants qui souffrent. Être le père, la mère des enfants pauvres, voilà notre plus haute mission. Avoir pour eux un sentiment maternel, c’est avoir un sentiment fraternel pour l’humanité. »

« M. Victor Hugo rappelle ensuite les conclusions d’un travail fait par l’Académie de médecine de Paris, il y a dix-huit ans, sur l’hygiène des enfants. L’enquête faite à ce sujet constate que la plupart des maladies qui emportent tant d’enfants pauvres tiennent