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Jersey, qui lui en avaient donné la mission, et avec l’adhésion de la proscription républicaine tout entière, a déclaré que les proscrits républicains, fidèles au grand précédent de Février, abjuraient à jamais, quel que fût l’avenir, toute idée d’échafauds politiques et de représailles sanglantes, ― puisque ce discours a causé, au dire de la Patrie, une si grande indignation à Jersey, il n’excitera certainement pas moins d’indignation en France, et la Patrie ne saurait mieux faire que de le reproduire. Nous l’en défions.

« Je mets à la poste aujourd’hui même, à l’adresse du rédacteur de la Patrie, un exemplaire du discours.

« Quant à l’effet produit à Jersey, pour toute réponse, je me borne aux faits. Il y a quatre journaux à Jersey écrits en français. Ces journaux sont : la Chronique de Jersey, l’Impartial de Jersey, le Constitutionnel (de Jersey), la Patrie (de Jersey). Ces quatre journaux ont tous publié textuellement le discours de mon père et ont constaté le jour même l’effet produit par ce discours. Je les cite :

« La Chronique dit :

« Un puissant intérêt s’attachait à la cérémonie. On savait que M. Victor Hugo devait prendre la parole en cette occasion, et chacun voulait entendre cette grande et puissante voix. Aussi, longtemps avant l’arrivée du convoi funèbre, un grand concours de personnes, venues de la ville à pied et en voitures, se pressait déjà autour de la tombe. La procession, en entrant dans le cimetière, a fait le tour de la fosse creusée pour recevoir la dépouille du défunt, et le corps ayant été déposé dans sa dernière demeure, tout le monde s’est découvert, et c’est au milieu du silence le plus solennel que M. Hugo a prononcé, d’une voix fortement accentuée, l’admirable discours que nous reproduisons ici : »

(Suit le discours.)

« Tous les proscrits ont répété ce cri ; puis chacun d’eux est venu, morne et silencieux, déposer une poignée de terre sur la bière de leur défunt frère. Le discours prononcé dans cette occasion fera époque dans les annales du petit cimetière des Indépendants de la paroisse de Saint-Jean. Le jour viendra où l’on montrera aux étrangers l’endroit où Victor Hugo, le grand orateur, le grand poëte, adressa à ses frères exilés les nobles et touchantes paroles qui vont avoir un retentissement universel et seront soigneusement recueillies par l’histoire. »

« Le Constitutionnel (de Jersey), après avoir reproduit le discours, dit :

« Un grand nombre de jersiais, venus au cimetière de Saint-Jean, ont été heureux d’entendre un pareil langage dans la bouche de notre hôte illustre. »