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La vérité, la voici : c’est qu’à cette heure il n’est permis à personne d’être indifférent aux grandes choses qui s’accomplissent ; c’est qu’il faut à l’œuvre auguste de la délivrance universelle commencée aujourd’hui l’effort de tous, le concours de tous, le coup de main de tous ; c’est que pas une oreille ne doit se fermer, c’est que pas un cœur ne doit se taire ; c’est que là où s’élève le cri de tous les peuples il doit y avoir un écho dans les entrailles de tous les hommes ; c’est que celui qui n’a qu’un sou doit le donner aux libérateurs, c’est que celui qui n’a qu’une pierre doit la jeter aux tyrans. (Applaudissements.)

Que les uns agissent, que les autres parlent, que tous travaillent ! oui, à la manœuvre tous ! Le vent souffle. Que l’encouragement public aux héros soit la joie des âmes ! que les multitudes s’empourprent d’enthousiasme comme une fournaise ! Que ceux qui ne combattent pas par l’épée, combattent par l’idée ! Que pas une intelligence ne reste neutre, que pas un esprit ne reste oisif ! Que ceux qui luttent se sentent regardés, aimés et appuyés ! Qu’autour de cet homme vaillant qui est debout là-bas dans Palerme il y ait un feu sur toutes les montagnes de la Sicile et une lumière sur tous les sommets de l’Europe ! (Bravo !)

Je viens de prononcer ce mot, les tyrans, ai-je exagéré ?

Ai-je calomnié le gouvernement napolitain ? Pas de paroles. Voici des faits.

Faites attention. Ceci est de l’histoire vivante ; on pourrait dire, de l’histoire saignante. (Écoutez !)

Le royaume de Naples, ― celui dont nous nous occupons en ce moment, ― n’a qu’une institution, la police. Chaque district a sa « commission de bastonnade ». Deux sbires, Ajossa et Maniscalco, règnent sous le roi ; Ajossa bâtonne Naples, Maniscalco bâtonne la Sicile. Mais le bâton n’est que le moyen turc ; ce gouvernement a de plus le procédé de l’inquisition, la torture. Oui, la torture. Écoutez. Un sbire, Bruno, attache les accusés la tête entre les jambes jusqu’à ce qu’ils avouent. Un autre sbire, Pontillo, les assied sur un gril et allume du feu dessous ; cela s’appelle « le fauteuil ardent ». Un autre sbire, Luigi Maniscalco, parent du chef, a inventé un instrument ; on y introduit le bras ou la jambe du patient, on tourne un écrou, et le