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LA DÉPORTATION.

sont, après tout, que des hommes négatifs. (C’est vrai !)

Mais qu’une révolution éclate, les hommes d’affaires, les gens habiles, qui semblaient des colosses, ne sont plus que des nains ; toutes les réalités qui n’ont plus la proportion des événements nouveaux s’écroulent et s’évanouissent ; les faits matériels tombent, et les idées grandissent jusqu’au ciel. (Mouvement.)

C’est ainsi, par cette soudaine force d’expansion que les idées acquièrent en temps de révolution, que s’est faite cette grande chose, l’abolition de la peine de mort en matière politique.

Messieurs, cette grande chose, ce décret fécond qui contient en germe tout un code, ce progrès, qui était plus qu’un progrès, qui était un principe, l’assemblée constituante l’a adopté et consacré. Elle l’a placé, je dirais presque au sommet de la constitution, comme une magnifique avance faite par l’esprit de la révolution à l’esprit de la civilisation, comme une conquête, mais surtout comme une promesse, comme une sorte de porte ouverte qui laisse pénétrer, au milieu des progrès obscurs et incomplets du présent, la lumière sereine de l’avenir.

Et en effet, dans un temps donné, l’abolition de la peine capitale en matière politique doit amener et amènera nécessairement, par la toute-puissance de la logique, l’abolition pure et simple de la peine de mort ! (Oui ! oui !)

Eh bien, messieurs, cette promesse, il s’agit aujourd’hui de la retirer ! cette conquête, il s’agit d’y renoncer ! ce principe, c’est-à-dire la chose qui ne recule pas, il s’agit de le briser ! cette journée mémorable de février, marquée par l’enthousiasme d’un grand peuple et par l’enfantement d’un grand progrès, il s’agit de la rayer de l’histoire ! Sous le titre modeste de loi sur la déportation, le gouvernement nous apporte et votre commission vous propose d’adopter un projet de loi que le sentiment public, qui ne se trompe pas, a déjà traduit et résumé en une seule ligne, que voici : La peine de mort est rétablie en matière politique. (Bravos à gauche. — Dénégations à droite. — Il n’est pas question de cela ! — On comble une lacune du code ! voilà tout. — C’est pour remplacer la peine capitale !)

Vous l’entendez, messieurs, les auteurs du projet, les