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V

LA DÉPORTATION[1]

5 avril 1850.

Messieurs, parmi les journées de février, journées qu’on ne peut comparer à rien dans l’histoire, il y eut un jour admirable, ce fut celui où cette voix souveraine du peuple qui, à travers les rumeurs confuses de la place publique, dictait les décrets du gouvernement provisoire, prononça cette grande parole : La peine de mort est abolie en matière politique. (Très bien !) Ce jour-là, tous les cœurs généreux, tous les esprits sérieux tressaillirent. Et en effet, voir le progrès sortir immédiatement, sortir calme et majestueux d’une révolution toute frémissante ; voir surgir au-dessus des masses émues le Christ vivant et couronné ; voir du milieu de cet immense écroulement de lois humaines se dégager dans toute sa splendeur la loi divine (Bravo !) ; voir la multitude se comporter comme un sage ;

  1. Note : Par son message du 31 octobre 1849, M. Louis Bonaparte avait congédié un ministère indépendant et chargé un ministère subalterne de l’exécution de sa pensée.

    Quelques jours après, M. Rouher, ministre de la justice, présenta un projet de loi sur la déportation.

    Ce projet contenait deux dispositions principales, la déportation simple dans l’île de Pamanzi et les Marquises, et la déportation compliquée de la détention dans une enceinte fortifiée, la citadelle de Zaoudzi, près l’île Mayotte.

    La commission nommée par l’assemblée adopta la pensée du projet, l’emprisonnement dans l’exil. Elle l’aggrava même en ce sens qu’elle autorisait l’application rétroactive de la loi aux condamnés antérieurement à sa promulgation. Elle substitua l’île de Noukahiva à l’île de Pamanzi,