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L’EXPÉDITION DE ROME.

avec restriction mentale, je les ignore (on rit) ; —… l’assemblée constituante vota, nous votâmes l’expédition romaine, afin qu’il ne fût pas dit que la France était absente, quand, d’une part, l’intérêt de l’humanité, et, d’autre part, l’intérêt de sa grandeur l’appelaient, afin d’abriter en un mot contre l’Autriche Rome et les hommes engagés dans la république romaine, contre l’Autriche qui, dans cette guerre qu’elle fait aux révolutions, a l’habitude de déshonorer toutes ses victoires, si cela peut s’appeler des victoires, par d’inqualifiables indignités ! (Longs applaudissements à gauche. Violents murmures à droite. — L’orateur, se tournant vers la droite).

Vous murmurez ! Cette expression trop faible, vous la trouvez trop forte ! Ah ! de telles interruptions me font sortir du cœur l’indignation que j’y refoulais ! Comment ! la tribune anglaise a flétri ces indignités aux applaudissements de tous les partis, et la tribune de France serait moins libre que la tribune d’Angleterre ! (Écoutez ! écoutez !) Eh bien ! je le déclare, et je voudrais que ma parole, en ce moment, empruntât à cette tribune un retentissement européen, les exactions, les extorsions d’argent, les spoliations, les fusillades, les exécutions en masse, la potence dressée pour des hommes héroïques, la bastonnade donnée à des femmes, toutes ces infamies mettent le gouvernement autrichien au pilori de l’Europe ! (Tonnerre d’applaudissements.)

Quant à moi, soldat obscur, mais dévoué, de l’ordre et de la civilisation, je repousse de toutes les forces de mon cœur indigné ces sauvages auxiliaires, ces Radetzki et ces Haynau (mouvement), qui prétendent, eux aussi, servir cette sainte cause, et qui font à la civilisation cette abominable injure de la défendre par les moyens de la barbarie ! (Nouvelles acclamations.)

Je viens de vous rappeler, messieurs, dans quel sens l’expédition de Rome fut votée. Je le répète, c’est un devoir que j’ai rempli. L’assemblée constituante n’existe plus, elle n’est plus là pour se défendre ; son vote est, pour ainsi dire, entre vos mains, à votre discrétion ; vous pouvez attacher à ce vote telles conséquences qu’il vous plaira. Mais s’il arrivait, ce qu’à Dieu ne plaise, que ces consé-