Page:Hugo - Actes et paroles - volume 2.djvu/166

Cette page a été validée par deux contributeurs.
158
AVANT L’EXIL. — CONGRÈS DE LA PAIX.

vous le rappelais tout à l’heure, tous les progrès s’y révèlent et s’y manifestent à la fois, les uns amenant les autres ; chute des animosités internationales, effacement des frontières sur la carte et des préjugés dans les cœurs, tendance à l’unité, adoucissement des mœurs, élévation du niveau de l’enseignement et abaissement du niveau des pénalités, domination des langues les plus littéraires, c’est-à-dire les plus humaines ; tout se meut en même temps, économie politique, science, industrie, philosophie, législation, et converge au même but, la création du bien-être et de la bienveillance, c’est-à dire, et c’est là pour ma part le but auquel je tendrai toujours, extinction de la misère au dedans, extinction de la guerre au dehors. (Applaudissements.)

Oui, je le dis en terminant, l’ère des révolutions se ferme, l’ère des améliorations commence. Le perfectionnement des peuples quitte la forme violente pour prendre la forme paisible. Le temps est venu où la providence va substituer à l’action désordonnée des agitateurs l’action religieuse et calme des pacificateurs. (Oui ! oui !)

Désormais, le but de la politique grande, de la politique vraie, le voici : faire reconnaître toutes les nationalités, restaurer l’unité historique des peuples et rallier cette unité à la civilisation par la paix, élargir sans cesse le groupe civilisé, donner le bon exemple aux peuples encore barbares, substituer les arbitrages aux batailles ; enfin, et ceci résume tout, faire prononcer par la justice le dernier mot que l’ancien monde faisait prononcer par la force. (Profonde sensation.)

Messieurs, je le dis en terminant, et que cette pensée nous encourage, ce n’est pas aujourd’hui que le genre humain est en marche dans cette voie providentielle. Dans notre vieille Europe, l’Angleterre a fait le premier pas, et par son exemple séculaire elle a dit aux peuples : Vous êtes libres. La France a fait le second pas, et elle a dit aux peuples : Vous êtes souverains. Maintenant faisons le troisième pas et tous ensemble, France, Angleterre, Belgique, Allemagne, Italie, Europe, Amérique, disons aux peuples : Vous êtes frères ! (Immense acclamation. — L’orateur se rassied au milieu des applaudissements.)