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LA RÉVISION DE LA CONSTITUTION.

toujours le droit. C’est ce qui fait que d’une république étouffée il reste un droit, tandis que d’une monarchie écroulée il ne reste qu’une ruine. (Applaudissements.)

Cessez donc, vous légitimistes, de nous adjurer au point de vue du droit. Vis-à-vis du droit du peuple, qui est la souveraineté, il n’y pas d’autre droit que le droit de l’homme, qui est la liberté. (Très bien ! ) Hors de là, tout est chimère. Dire le droit du roi, dans le grand siècle où nous sommes, et à cette grande tribune où nous parlons, c’est prononcer un mot vide de sens.

Mais, si vous ne pouvez parler au nom du droit, parlerez-vous au nom du fait ? Invoquerez-vous l’utilité ? C’est beaucoup moins superbe, c’est quitter le langage du maître pour le langage du serviteur ; c’est se faire bien petit. Mais soit ! Examinons. Direz-vous que la stabilité politique naît de l’hérédité royale ? Direz-vous que la démocratie est mauvaise pour un état, et que la royauté est meilleure ? Voyons, je ne vais pas me mettre à feuilleter ici l’histoire, la tribune n’est pas un pupitre à in-folio ; — je reste dans les faits vivants, actuels, présents à toutes les mémoires. Parlez, quels sont vos griefs contre la république de 1848 ? Les émeutes ? Mais la monarchie avait les siennes. L’état des finances ? Mon Dieu ! je n’examine pas, ce n’est pas le moment, si depuis trois ans les finances de la république ont été bien démocratiquement conduites…

À Droite. — Non ! fort heureusement pour elles !

M. Victor Hugo. — … Mais la monarchie constitutionnelle coûtait fort cher ; mais les gros budgets, c’est la monarchie constitutionnelle qui les a inventés. Je dis plus, car il faut tout dire, la monarchie proprement dite, la monarchie de principe, la monarchie légitime, qui se croit ou se prétend synonyme de stabilité, de sécurité, de prospérité, de propriété, la vieille monarchie historique de quatorze siècles, messieurs, faisait quelquefois, faisait volontiers banqueroute ! (Rires et applaudissements.)

Sous Louis XIV, je vous cite la belle époque, le grand siècle, le grand règne, sous Louis XIV, on voit de temps en temps pâlir, c’est Boileau qui le dit, le rentier

À l’aspect d’un arrêt qui retranche un quartier.