Page:Hugo - Actes et paroles - volume 2.djvu/105

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
97
LA LIBERTÉ DE LA PRESSE.

Voilà pour les journaux.

Quant au droit de réunion, fort bien ! les assemblées populaires seront résorbées par les sociétés secrètes. Vous ferez rentrer ce qui veut sortir. Répercussion inévitable. Au lieu de la salle Martel et de la salle Valentino, où vous êtes présents dans la personne de votre commissaire de police, au lieu de ces réunions en plein air où tout s’évapore, vous aurez partout de mystérieux foyers de propagande où tout s’aigrira, où ce qui n’était qu’une idée deviendra une passion, où ce qui n’était que de la colère deviendra de la haine.

Voilà pour le droit de réunion.

Ainsi, vous vous serez frappés avec vos propres lois, vous vous serez blessés avec vos propres armes !

Les principes se dresseront de toutes parts contre vous ; persécutés, ce qui les fera forts ; indignés, ce qui les fera terribles ! (Mouvement.)

Vous direz : Le péril s’aggrave.

Vous direz : Nous avons frappé le suffrage universel, cela n’a rien fait. Nous avons frappé le droit de réunion, cela n’a rien fait. Nous avons frappé la liberté de la presse, cela n’a rien fait. Il faut extirper le mal dans sa racine.

Et alors, poussés irrésistiblement, comme de malheureux hommes possédés, subjugués, traînés par la plus implacable de toutes les logiques, la logique des fautes qu’on a faites (Bravo !), sous la pression de cette voix fatale qui vous criera : Marchez ! marchez toujours ! — que ferez-vous ?

Je m’arrête. Je suis de ceux qui avertissent, mais je m’impose silence quand l’avertissement peut sembler une injure. Je ne parle en ce moment que par devoir et avec affliction. Je ne veux pas sonder un avenir qui n’est peut-être que trop prochain. (Sensation.) Je ne veux pas presser douloureusement et jusqu’à l’épuisement des conjectures les conséquences de toutes vos fautes commencées. Je m’arrête. Mais je dis que c’est une épouvante pour les bons citoyens de voir le gouvernement s’engager sur une pente connue au bas de laquelle il y a le précipice.

Je dis qu’on a déjà vu plus d’un gouvernement descendre cette pente, mais qu’on n’en a vu aucun la remonter. Je