Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome VI.djvu/166

Cette page n’a pas encore été corrigée

144 THEATRE DE JEUNESSE.

L’ALCADE.

Je te crois. C’est toi qui m’as dit tout ce que je sais sur cette ténébreuse histoire. L’infant don Pèdre retarde son union avec la nièce de la reine j l’invasion des maures, rend, dit-il, sa présence nécessaire à l’armée. C’est toi qui m’as fait connaître et m’as mis à même d’apprendre à la reine le véritable motif de ses retards, tu m’as révélé son mariage secret avec dona Inez de Castro j il me fallait des preuves de cette alliance j aujourd’hui tu me découvres l’asile où sont cachés les deux enfants, fruits de ces amours clandestines. Écoute, tu n’es pas un mendiant, toi qui connais les secrets des roisj dis-moi qui tu es. Mes bienfaits et ceux de la reine récompenseront ton zèle, pourvu que ta discrétion l’égale. LE MENDIANT.

Alcade d’Alpunar, tu parlais tout à l’heure de l’invasion des maures ?. . . L’ALCADE.

Oui, mais ton nom.^* c’est ton nom que je te demande. Compte sur ma reconnaissance. . .

LE MENDIANT.

Alcade, je suis Albaracin, le chef des maures. L’ALCADE.

Qu’entends-je .^ Vous, ce chef redouté !

ALBARACIN.

La seule présence de l’infant don Pèdre au camp portugais m’empêche de pénétrer jusqu’à Lisbonne j des soldats commandés par lui sont invincibles. J’ai dû chercher un moyen de me délivrer de cet ennemi formidable j je l’ai trouvé. Mes émissaires ont découvert le mariage caché de l’héritier du trône avec une fille d’honneur de la reine. Alors, sous ce déguisement, je suis venu à toi, alcade, à toi, le confident des secrets de cette reine. Je n’en ai point rougi. Le roi Boabdil venait ainsi souvent s’asseoir inconnu sous la tente de l’ennemi. Je t’ai appris le mariage clandestin de l’infant, je te livre ses deux enfants : maintenant c’est aux fureurs de cette reine à me servir. Les périls de tout ce qu’il a de cher au monde rappelleront don Pèdre à Lisbonne. Je ne tarderai pas à l’y suivre, car je ne crains pas l’armée, mais seulement le général.